Participation de la France à la 38e session du comité juridique : cyber-sécurité et règlement des différends
Du 22 au 25 mars 2022, le Comité juridique de l’OACI s’est réuni pour sa 38ème session. Il s’agissait de la première réunion de cette instance depuis 2018. Constitué d’experts juridiques et ouverts à tous les Etats contractants ainsi qu’aux organisations internationales à titre d’observateurs, le Comité a pour rôle de donner des conseils sur l’interprétation de la Convention de 1944 relative à l’aviation civile internationale (« Convention de Chicago ») et des autres instruments constituant le droit aérien international.
Les discussions du Comité ont commencé avec un examen de la pertinence des instruments actuels de droit aérien international quant à la riposte contre les cyber-menaces dirigées contre l’aviation civile. L’aviation civile dépend aujourd’hui d’infrastructures et de systèmes informatiques critiques et l’Assemblée de l’OACI, lors de sa 40ème session, avait affirmé l’importance et l’urgence d’assurer leur protection. L’enjeu de l’étude du Comité était de déterminer quelles dispositions du droit aérien permettent la prévention, les poursuites et les réactions au cyber-incidents ou si celles-ci sont insuffisantes. Le Protocole et la Convention de Pékin de 2010 ont été évalués comme les instruments les mieux adaptés pour faire face aux cyber-menaces, mais ont pour inconvénient de faire l’objet, à ce stade, d’un faible taux de ratification. Valérie Gougaud, Cheffe du bureau du droit européen et international de la Direction générale de l’Aviation civile (DGAC) est intervenue, au nom de la France, pour souligner que ces instruments ont bien été ratifiés par la France et encourager les autres Etats à faire de même.
Le Comité a également examiné la discussion en cours sur la procédure de règlement des différends en vertu de l’article 84 de la Convention de Chicago. Terry Olson, conseiller d’Etat et conseiller juridique du directeur général de la DGAC, qui préside le groupe de travail chargé de l’examen du règlement de l’OACI pour la solution des différends, a souligné que ce texte n’a pas été modifié depuis 1957, en dépit des évolutions intervenues en la matière.
Les modifications principales proposées par le groupe de travail visent à introduire plus d’efficacité dans le dispositif de l’article 84, par exemple en prévoyant la possibilité de décider de mesures provisoires, l’obligation de motiver les décisions et le recours à des experts juridiques externes pour aider le Conseil à prendre une décision. Il y a actuellement plusieurs instances en cours dans le cadre de cette procédure, notamment le litige introduit par l’Australie et le Royaume des Pays Bas contre la Russie pour la destruction du vol MH17.
Les discussions du comité ont également permis d’examiner plusieurs sujets qui seront étudiés plus en profondeur dans les sessions à venir, notamment les vols des drones et le respect de la vie privée.
Plusieurs délégations, dont la France, ont également soulevé les violations par la Russie du droit aérien international à l’occasion de son invasion de l’Ukraine. Elles ont condamné le non-respect par la Russie de ses obligations, de manière massive et répétée, au titre notamment des articles 1 (souveraineté), 18 (double immatriculation), 31 (certificats de navigabilité) et 83bis (transfert de certaines fonctions et obligations) de la Convention de Chicago.
Cette atteinte à l’ordre juridique international de l’aviation est particulièrement préoccupante en cette année 2022, qui marque le 75e anniversaire du Comité juridique. Depuis sa création, ce Comité a élaboré 24 conventions internationales en matière de sécurité, sûreté, responsabilité et financement des aéronefs. Aujourd’hui, son rôle est de promouvoir la ratification de ces instruments et de répondre à toute question nouvelle ou émergente nécessitant une évolution du droit aérien international, tel que l’explique Michael Gill, directeur du bureau des affaires juridiques de l’OACI : « Les instruments de l’OACI ne sont pas simplement des textes juridiques arides pour alimenter les débats entre avocats. Il s’agit de documents évolutifs destinés à renforcer les objectifs globaux de l’OACI en matière de sécurité, de sûreté et de durabilité du transport aérien. »